Devrait-on changer notre mode de scrutin? Plus de deux mois après le vote, nous discutons toujours de la place à faire au parti conservateur du Québec à l’Assemblé nationale. Si plusieurs s’accordent sur le fait que notre mode de scrutin n’est plus adapté à notre paysage politique à cinq partis. D’autres disent qu’il n’est pas normal qu’une formation recueillant 500 000 votes n’ait pas sa place à l’Assemblée nationale. Or, les changements proposés font bien moins consensus.
Nous pouvons comprendre le peu d’appétit pour une réforme du mode de scrutin de la part du gouvernant. En plus d’avoir lui-même bénéficié des distorsions qu’occasionne le système majoritaire uninominal à un tour, la perspective de se déchirer sur des points de détails, pointus et techniques, sur des seuils d’éligibilité et le découpage de zone électorale, pour au final faire autant de satisfaits que de mécontents refroidirait les ardeurs de n’importe qui. Sans compter que ce changement majeur devrait sûrement être entériné par un vote populaire, ce qui n’est pas du tout garanti
Changer le statut des chefs de parti
D’où l’idée de proposer une seule mesure ne changeant pas fondamentalement notre système électoral. Un changement assez ciblée pour éviter les cas extrêmes de représentativité que nous constatons avec le cas du Parti conservateur. Une mesure suffisamment simple pour avoir une chance de passer le processus législatif et se concrétiser.
L’énoncé de ce règlement pourrait se formuler comme suit : tout chef de formation politique récoltant au moins 10% du vote populaire devient député de l’Assemblée nationale ».
Cette mesure a l’avantage de garder tous les avantages du système électoral actuel. De plus, elle règle une fois pour toute la problématique de la représentativité des chefs. Plus jamais un parti ayant récolté un nombre conséquent de votes ne fera pas partie des débats parlementaires.
Garder les avantages du mode de scrutin actuel
Le système uninominal majoritaire à un tour continuera de favoriser une gouvernance stable. Il favorisera toujours l’élection de gouvernement majoritaire fort en évitant une fragmentation du vote avec une multiplication des petits partis. Deuxièmement, aucun citoyen ne perd son comté dans un redécoupage de circonscription ou perdu dans une région électorale nouvellement créée. Le lien qui relie le citoyen et son député est préservé.
Les chefs au service du peuple
À l’inverse, en détachant les chefs de parti de son rôle de député de circonscription, nous empêchons que ceux-ci favorisent indûment leur comté afin de favoriser leur réélection. Dorénavant, ils sont au service de la nation tout entière.
Moins d’élections partielles et hausse de la participation
Ce nouveau statut des chefs permettrait également de faire entrer directement les nouveaux chefs dans l’arène parlementaire dès que ceux-ci gagnent leur course au leadership. Plus besoin d’attendre une élection partielle ni de forcer la main à un député pour qu’il laisse sa place. Cela permettrait donc d’économiser les coûts d’une élection partielle. Rappelons qu’elle coûte en moyenne 550 000$ pièce et qu’elle se produise presque à chaque élection après qu’un chef, ce coup-ci Mme Anglade se fait montrer la porte.
Cette simple mesure pourrait également favoriser l’augmentation du taux de participation. Notamment en incitant à voter les électeurs d’un comté perdu à l’avance. L’électeur dont le candidat n’a pas chance de remporter sa circonscription sera tout de même motivé à voter afin de permettre de faire élire le chef à l’échelle nationale.
Alors devrait-on changer notre mode de scrutin? Bien sûr, cette seule mesure ne réglera pas tous les problèmes. Cependant, elle a le mérite d’être une mesure concrète qui pourrait être mise en place rapidement sans tout chambouler notre système politique. Elle nous familiarisait au concept de proportionnalité. Comme l’appétit vient en mangeant, il est possible que cette mesure ne soit qu’un début.