Donald Trump a forcé la renégociation du traité international de l'ALENA

Sortir des traités internationaux, comment ça marche?

Pour aider à expliquer la procédure pour sortir des traités internationaux prévue par le droit international, nous prendrons comme exemple la question à savoir si Donald Trump aurait pu sortir unilatéralement de l’Accord de libre-échange de nord-américain (ALÉNA) advenant que les renégociations initiées par ce dernier en 2017 ne l’aient pas satisfait.  

Tout d’abord, le président américain Donald Trump ne peut pas se retirer seul de l’ALÉNA du à la Constitution américaine qui nécessite l’accord du congrès en la matière. Donc si les États-Unis viendraient à se retirer unilatéralement du traité, ce serait une décision prise par les autorités américaines et non pas un acte solitaire de son président. 

Pour ce qui du point de vue du strict droit international, oui les États-Unis peuvent se retirer de l’ALÉNA sans avoir l’accord du Canada et du Mexique. Tout simplement parce que le traité signé entre les trois parties l’autorise explicitement à son article 2205 : «Une Partie pourra se retirer du présent accord six mois après avoir signifié un avis écrit de retrait aux autres Parties. Si une Partie se retire de l’accord, celui-ci demeurera en vigueur pour les Parties subsistantes». Donc, sur la question de savoir si les États-Unis ont le droit de se retirer unilatéralement de ce traité, le débat et clos, oui, ils ont le droit.

Maintenant, pour ce qui est de la procédure de retrait, l’article 2205 est aussi limpide quant à la marche à suivre. Pour se retirer, un pays doit signifier par écrit son intention de se retirer de l’accord aux autres parties prenantes de l’accord, dans notre cas de figure : le Mexique et le Canada, et ensuite attendre une période de 6 mois avant de se retirer définitivement. 

Suite au retrait des États-Unis, l’accord 2205 est toujours aussi limpide quant aux engagements des autres pays: «Si une Partie se retire de l’accord, celui-ci demeurera en vigueur pour les Parties subsistantes». C’est-à-dire que l’accord demeure en vigueur entre le Canada et le Mexique. Toutes les dispositions de l’accord resteront alors inchangées, mais ne concerneront plus les États-Unis, les liens qui lient le Mexique et le Canada demeureront inchangé. Il est clair que les effets du retrait des États-Unis de l’ALÉNA seraient néfastes pour les deux autres partenaires étant donné que les États-Unis est de loin le plus gros marché dans cet accord, mais du strict point de vue du droit international, rien ne changerait. 

Maintenant, intéressons-nous à l’hypothèse où, par mégarde, les pays signataires de l’ALÉNA aurait oublié d’inclure l’article 2205 au traité et d’aucun article viendrait encadrer la sortie du traité. Quelle règle de droit s’appliquerait? 

Ici, la Convention de Vienne sur le droit des traités nous offre des pistes de solutions pour répondre à cette question hypothétique résultant de la maladresse des diplomates chargés d’écrire le traité de l’ALÉNA.  En effet, cette Convention donne plusieurs solutions si un État désire se retirer d’un traité notamment l’article 54 qui stipule: 

Extinction d’un traité ou retrait en vertu des dispositions du traité ou par consentement des parties. L’extinction d’un traité ou le retrait d’une partie peuvent avoir lieu : a) conformément aux dispositions du traité; ou, b) à tout moment, par consentement de toutes les parties, après consultation des autres Etats contractants4. 

Donc une des solutions possibles pour se retirer d’un traité lorsqu’aucun article ne décrit la procédure de retrait est de négocier avec les autres parties prenantes afin de trouver un accord sur la sortie du traité. Mais qu’arriverait-il si après négociation, les États-Unis ne trouvaient pas le consentement du Canada et du Mexique pour se retirer de l’accord ? C’est alors l’article 56 de la Convention de Vienne sur le droit des traités qui s’appliquerait: 

1. Un traité qui ne contient pas de dispositions relatives à son extinction et ne prévoit pas qu’on puisse le dénoncer ou s’en retirer ne peut faire l’objet d’une dénonciation ou d’un retrait, à moins : a) qu’il ne soit établi qu’il entrait dans l’intention des parties d’admettre la possibilité d’une dénonciation ou d’un retrait; ou b) que le droit de dénonciation ou de retrait ne puisse être déduit de la nature du traité. 

2. Une partie doit notifier au moins douze mois à l’avance son intention de dénoncer un traité ou de s’en retirer conformément aux dispositions du paragraphe 1. 

Comme il est écrit, les États-Unis devraient signifier par écrit sa volonté de se retirer de l’ALÉNA et ensuite attendre 12 mois avant que son retrait prenne effet. D’ici son retrait effectif, le traité continuerait d’être en vigueur. Plus encore, les États-Unis pourraient utiliser l’article 62 de la même Convention pour arriver à leur fin : 

1. Un changement fondamental de circonstances qui s’est produit par rapport à celles qui existaient au moment de la conclusion d’un traité et qui n’avait pas été prévu par les parties ne peut pas être invoqué comme motif pour mettre fin au traité ou pour s’en retirer, à moins que: a) l’existence de ces circonstances n’ait constitué une base essentielle du consentement des parties à être liées par le traité; et que b) ce changement n’ait pour effet de transformer, radicalement la portée des obligations qui restent à exécuter en vertu du traité.

2. Un changement fondamental de circonstances ne peut pas être invoqué comme motif pour mettre fin à un traité ou pour s’en retirer: a) s’il s’agit d’un traité établissant une frontière, ou b) si le changement fondamental résulte d’une violation, par la partie qui l’invoque, soit d’une obligation du trait é, soit de toute autre obligation internationale à l’égard de toute autre partie au traité6. 

Dans ce cas de figure plus extrême, les États-Unis pourraient prétexter que le déficit de la balance commerciale entre les États-Unis et le Mexique est rendu si grand qu’il s’agit d’un changement fondamental de circonstance qui n’existait pas au moment de la conclusion de l’accord. Ce qui aurait pour conséquence de permettre aux États-Unis de se retirer de l’accord.

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